Le rôle multi-facettes du PMO (Project Management Officer)

’innovation en matière d’organisation des entreprises est au cœur de l’ADN des sociétés nées avec le numérique. Le PMO (Project Management Officer) en est l’un de ses porte-drapeaux. Qui est-il, que fait-il et comment s’inscrit-t-il dans l’organisation ?

La fonction du PMO

Selon l’observatoire des métiers du Numérique, de l’Ingénierie, des Études et du Conseil et de l’Evénement (OPIIEC), « le PMO réalise des missions de structuration et d’assistance au pilotage de projets. Il intervient soit directement dans un projet auprès du chef de projet, soit pour le compte d’une direction pour un suivi transversal du portefeuille de projets ». Il est en charge de suivre les avancements des projets, leurs contraintes, leurs risques et leur conformité, et de communiquer sur leurs avancées. Mais pour Stéphane Bautista, PMO chez OVH, « notre métier n’est pas le même dans toutes les entreprises. Tout dépend de leur culture, de leur vision, et bien sûr de leur activité. Au cours de mon poste précédent — chez un fournisseur de solutions informatiques dédiées aux secteurs du tourisme et du voyage — je faisais surtout de la planification. Aujourd’hui chez OVH, je suis plutôt un « ordonnanceur » ».

Zoom sur le rôle de PMO chez OVH

Chez OVH, l’entreprise est organisée en « Units », c’est-à-dire en groupes de travail qui peuvent compter jusqu’à 300 personnes, composés de collaborateurs issus de différentes expertises. Ces groupes sont chacun coordonnés et pilotés respectivement par un PMO et un Program Manager, qui fonctionnent en binôme. Ce dernier a une vision globale des projets et est en charge de les aligner avec la stratégie d’entreprise d’OVH.

Gauthier Dubuis est PMO dans une Product Unit chez OVH. Il pilote un groupe de travail dédié au développement de produits, par exemple une solution de stockage ou de bureau virtuel. « J’anime ce groupe en fonction d’une roadmap définie à l’année, j’assure le suivi des projets, l’animation des réunions, et je m’assure que le groupe répond à sa mission de livrer les projets de la roadmap. » Cette Unit est essentiellement constituée des équipes de développement et de supervision de la production. Gauthier fournit par ailleurs à ces équipes une vision transverse, les projets impliquant souvent des dépendances entre les différentes Units. « Ce qui implique un travail important de recueil et de partage d’informations pour donner du sens aux projets, et pour les inscrire dans la stratégie de l’entreprise. Cet aspect du métier est fondamental dans un modèle d’entreprise libérée ». Il compare son rôle à celui d’un facilitateur, qui fluidifie les processus de mise en œuvre des projets.

Stéphane anime la « Customer Unit » intitulée « Web – Telco », qui développe des solutions en fonction d’une typologie de clients. Il rassemble régulièrement autour d’une table entre huit et dix représentants des différentes expertises composant la Customer Unit, pour définir et discuter avec elles des projets sur lesquels elles travaillent. Ils peuvent par exemple concerner l’étude du besoin client, l’adaptation du produit en lien avec la Product Unit associée, le lancement commercial de nouveaux produits, ou encore la mise en place de promotions temporaires. Ces représentants, ce sont des responsables des ventes, du service client, du marketing digital, du marketing stratégique, de la finance, et aussi du développement et de la production. Qui prend les décisions finales ? « Tout le monde ! Il n’y a pas de hiérarchie donc les décisions sont collaboratives. Comme dans tout groupe, certaines personnes ont plus de charisme que d’autres, mais personne ne tape du poing sur la table. Ce n’est pas dans notre culture. Toutes les décisions sont des co-décisions prises en bonne entente, et dans la bonne humeur ! ». Stéphane organise les réunions, construit la vision des groupes de travail, assure qu’ils sont bien coordonnés, qu’ils avancent dans les temps et les budgets, identifie les potentiels besoins en ressources humaines et assure qu’ils soient pourvus. Mais aussi, il transmet de l’énergie aux collaborateurs, le carburant dont ils ont besoin pour avancer.

Une fois les projets réalisés, les Unit reportent ensuite au Comex par l’intermédiaire de leur Program Manager. Le Comité de direction ne valide ou ne sanctionne pas le travail des individus mais celui du groupe, sur la base de ses résultats, grâce à des KPI définis en amont. « Cette grande autonomie est très appréciable. Notre Unit fonctionne en fait comme une petite entreprise à l’intérieur de la grande, en charge de mener de nombreux projets », commente Stéphane.

Quelles sont les compétences d’un bon PMO ?

Il n’y a pas de profil type du PMO. Après un cursus en école d’ingénieur spécialisée en informatique, Stéphane a suivi les cours d’une école de management. « Mais ce n’est pas tant mon cursus qui fait de moi un bon PMO que mon état d’esprit. Il faut avoir de bonnes compétences relationnelles, humaines, être dynamique, et savoir instiller un sentiment d’émulation aux équipes ».

Gauthier a suivi un double cursus et possède deux masters : en marketing et en économie – gestion. Il a rejoint OVH il y a un an, après avoir travaillé comme chef de projet dans différentes agences digitales. « La première qualité du PMO est celle de savoir s’adapter. Aux différentes personnes avec qui l’on travaille et leurs métiers, aux nombreux projets qui impliquent de se familiariser avec des sujets variés, mais aussi aux situations imprévisibles qui peuvent arriver à tout moment et qui nécessitent d’être maitrisées ». Le PMO doit aussi savoir créer une relation avec chacun des collaborateurs, et avoir toujours pour objectif de défendre leurs intérêts. « Il faut donc faire preuve d’initiative et de diplomatie, et cela n’est pas possible sans une bonne dose d’humilité. Car un PMO doit pouvoir insuffler une dynamique sans commander, c’est-à-dire inspirer confiance. C’est un défi de tous les jours que je trouve passionnant ! »

La fin de l’organisation traditionnelle

Ce mode organisationnel s’inscrit directement dans l’approche de ce que l’on appelle l’ « entreprise libérée ». Le terme est apparu pour la première fois dans les années 1990**. L’idée est de favoriser l’innovation en plaçant l’humain au cœur des préoccupations de l’entreprise, en valorisant et en encourageant le développement de ses talents et compétences. Cela est possible en remettant en cause les organisations aux hiérarchies pyramidales. C’est-à-dire en misant sur l’intelligence collective, et sur la fluidification des processus de prise de décision. C’est un mode organisationnel qui décloisonne les expertises, qui favorise la collaboration, et qui encourage la créativité. Il s’inscrit dans le prolongement des méthodes agiles de développement de projets informatiques de type « getting things done », « eXtreme programming », « Scrum », ou encore « lean ».

L’entreprise libérée et les « digital natives »

Dans un contexte où il devient parfois complexe de retenir les collaborateurs, mais aussi de les encourager à s’engager au travail, de nombreuses entreprises nées avant la révolution digitale ont pris conscience de la nécessité de remettre en cause leur organisation. Pour y parvenir, ces dernières doivent effectuer une transformation complète de leurs modes opératoires. Mais pour les entreprises « digital natives » des années 2000 comme OVH et les GAFAM, la simplification organisationnelle est dans leur ADN. Et la mise en place de modes de travail transverses et collaboratifs, de postes de PMO, mais aussi la diffusion d’une culture de l’importance des relations humaines et du bien-être au travail sont les méthodes les plus emblématiques de ces entreprises libérées. Stéphane précise : « Chez OVH, nous avons la possibilité de suivre des formations qui nous permettent de développer notre sens de l’empathie, de la communication et de la gestion des relations humaines. Car la grande qualité de nos rapports sociaux simplifie, fluidifie et améliore beaucoup nos performances opérationnelles. »

*The Project Management Office: it’s just not what it used to be, University of Southern Queensland, Brisbane, Australia

** L’entreprise libérée : libération, management, Tom Peters, consultant chez le cabinet de conseil McKinsey, Edition Persée, 1993.

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